• Henri FORD

     

    PORTRAIT MYTHIQUE

    Henry Ford : l’homme de la Ford T
    Henry Ford : l’homme de la Ford T


    Henry Ford rêvait d’une voiture universelle. Il créa la Ford T, qui fit sa gloire ainsi que sa fortune. Despote et intransigeant, ce premier géant de l’automobile ne sut pas changer de cap pour rentrer dans l’ère de la modernité. Sans l’arrivée de son fils puis de son petit-fils à la tête de la Ford Motor Company, son empire aurait périclité.

    La veille de Noël 1893, Henry Ford exulte de joie. Avec l’aide de sa femme Clara, il vient de faire démarrer le moteur à explosion qu’il a créé de toutes pièces. Fixés à l’évier de la cuisine, les deux cylindres noirs et métalliques vibrent à l’unisson. Le moteur tousse, éructe, mais il fonctionne.
    Henry peut fabriquer sa première automobile et le 4 juin 1896, il démolit la porte de son atelier pour faire, à son bord, ses premiers tours de roues dans les rues de Detroit.
    Mais Henry Ford poursuit un rêve. A 33 ans, il veut s’affirmer comme constructeur et produire des centaines de voitures. A cette époque, c’est de l’inconscience. En Europe, les Allemands Benz, Daimler, Otto et Maybach ont créé, quelques années plus tôt, les premiers moteurs "à pétrole", et les artisans français Panhard et Levassor et Peugeot construisent des voitures "sans chevaux". Mais les Américains, eux, n’en sont qu’aux balbutiements. Les routes n’existent pas, ce ne sont le plus souvent que des chemins de terre.

    Des débuts mouvementés

    En cette fin de siècle, Ford sent pourtant que les Etats-Unis vont bientôt avoir besoin de moyens de locomotion autonomes. Dans le but de produire des voitures pour tous, il devient l’associé de William H. Murphy. C’est l’homme le plus riche de la région. Le 24 juillet 1899, la Detroit Automobile Company est fondée… sans grands succès puisqu’elle ferme ses portes deux ans plus tard.
    Les deux hommes ne baissent pas les bras et peu après, ils fondent la Henry Ford Company. Pour faire un peu de publicité, Henry décide de construire une voiture de course. Sur le circuit de Grosse-Pointe, il prend lui-même le volant et bat Alexander Winton, un coureur réputé. Cette victoire largement reprise par la presse lui permet d’obtenir une notoriété nationale. Les associés se séparent pourtant en mars 1902, la Henry Ford Company deviendra par la suite la firme Cadillac !
    Henry Ford loue alors un petit atelier à Detroit. Aidé par le champion cycliste Tom Cooper, il y construit deux voitures de courses, la 999 et l’Arrow. Il embauche un autre coureur cycliste, Barney Olfied, comme pilote. Cooper et Olfield collectionnent les victoires. Ford s’associe alors à Alexander Malcomson, propriétaire de plusieurs entrepôts de charbon. Ensemble, le 20 août 1903, ils fondent la Ford Motor Company.

    A comme abondance, T comme triomphe

    De leur usine sort la même année la Ford Model A. Ce modèle est mû par un deux cylindres développant huit chevaux. Sans avoir enregistré une seule commande, ils prennent le pari osé de lancer la production. L’entreprise est proche de la faillite quand le docteur Pfenning, de Chicago, se porte acquéreur d’un véhicule. Il est le premier d’une longue série d’acheteurs. Après quinze mois, 1 700 exemplaires sont vendus. C’est le début de la fortune.
    Malheureusement, Malcomson ne voit en l’automobile qu’un objet de luxe. Il fait fabriquer le modèle B, puis le K à six cylindres. Deux échecs commerciaux. Henry Ford se lasse des initiatives de son partenaire et, par un habile subterfuge, devient actionnaire majoritaire. Henry va reprendre son idée d’une voiture pour tous et sortir le Model N, la première Ford exportée en Europe.
    Pourtant, les ennuis ne sont pas encore finis. L’association des constructeurs américains, l’Alam, lui intente un procès, prenant comme prétexte le brevet Selden, dont ils sont les dépositaires : le 5 novembre 1895, Georges Selden, faisant valoir les plans qu’il aurait dessiné en 1877 d’un véhicule sans chevaux mû par un moteur à combustion interne, obtient un brevet du gouvernement américain. Il devient l’inventeur officiel de l’automobile… sans en avoir construit une seule ! L’association refuse à Henry Ford le droit de fabriquer des voitures.
    Mais, du procès, Henry n’en a cure et il va lancer une bombe dans le monde automobile. Le 1 er octobre 1908, la Ford T fait son apparition. Elle est haute sur pattes, on la surnomme l’araignée. Simple, frêle tout en étant d’une constitution robuste (utilisation de l’acier Vanadium), la "Tin Lizzie" (la bonne à tout faire de fer blanc), va connaître un succès sans précédent. La fabrication se modernise, avec les débuts du travail à la chaîne (Ford est un adepte du taylorisme). Les prix varient en fonction de l’offre : les bénéfices sont tels qu’en 1915, Ford rembourse 50 dollars à tous les acheteurs de Ford T ! Ses ouvriers sont les mieux payés de l’industrie automobile naissante. Ford Motor Company n’hésite pas à en faire la publicité dans les journaux. Henry Ford devient célèbre et extrêmement riche, d’autant plus qu’il gagne son procès contre l’association des constructeurs en 1911.
    Il fait feu de tout bois, produisant des tracteurs, des camions. Plusieurs usines ouvrent leur portes en Amérique et malgré la guerre, dans quelques pays d’Europe. Un hôpital Ford voit le jour, chargé de soigner les ouvriers ainsi que leurs familles. Mais la guerre est là et les Etats-Unis entrent dans le conflit. Bien que pacifiste dans l’âme, Henry Ford est obligé, sous peine de se voir coller l’étiquette de traître, de produire pour l’effort de guerre.

    Pas prêt pour la relève

    Après l’arrêt des hostilités, en 1919, la Ford Motor Company n’est pas au mieux, les ventes de la Ford T baissent. Alors écrasé sous le poids des factures à payer, Henry Ford ferme boutique pendant six semaines. Il restructure l’outil de production, ce qui lui permet d’abaisser les coûts. Enfin, pour faire taire ses nombreux détracteurs, Henry offre la présidence à son fils unique, Edsel. Les deux hommes vont racheter l’intégralité des actions de la marque.
    Les ventes reprennent et les usines tournent à plein rendement (plus de deux millions de véhicules seront produits en 1923). Les Ford rachètent la Lincoln Motor Company, qui devient la marque de prestige du groupe. Ils fondent des filiales en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, au Japon, au Danemark, en Belgique et même en France, d’où sortent des milliers de Ford T.
    Mais les ventes stagnent à nouveau puis fléchissent brusquement. La cause en est toute simple : avec le développement et l’amélioration du réseau routier, la demande du public a changé. Il veut des voitures plus belles et surtout plus confortables. La Ford T ne répond pas à ces critères.
    Entêté, Henry est persuade que cette voiture est universelle et que rien ne pourra la remplacer. Edsel soutient le contraire. En 1926, Henry Ford cède. Les usines ferment pendant six mois l’année suivante, pour mieux préparer l’arrivée du nouveau modèle. Ce qui fait les affaires des concurrents, Chevrolet par exemple !
    Enfin, le 2 septembre 1927, le Model A vient au monde. Mais il ne connaîtra pas le même succès que sa devancière, bien que la production dépasse les quatre millions d’unités en quatre ans.
    Henry Ford a beaucoup de mal à faire le deuil de la Ford T. D’autant que le monde change et la société Ford aussi. Bientôt viendront les Ford six cylindres et les V8. Puis Ford profite de la Seconde Guerre mondiale : il produit des Jeep, mais aussi 57 000 moteurs d’avion, 8 600 bombardiers, 7 000 véhicules chenillés.
    Le vieux Henry ne comprend plus ce monde où tout va si vite. Pourtant, dans un sursaut d’orgueil, il reprend, à la mort de son fils en 1943, les destinées de la firme. Mais pour sa femme, Clara, c’en est trop. Elle veut qu’il quitte la présidence, d’autant que le gouvernement voit d’un très mauvais œil qu’un homme de 80 ans s’occupe de la gestion de la société. Elle a le dernier mot, et le 21 septembre 1945, Henry Ford laisse les pleins pouvoirs à son petit-fils : Henry Ford II.
    Après une ultime révérence, le vieil homme, à 84 ans, quitte le monde des vivants le 7 avril 1947. Clara le suivra trois ans plus tard.

    Ses grandes dates

    1863 : le 30 juillet, Henry Ford naît à Dearborn, près de Detroit.
    1879 : il est apprenti mécanicien à Detroit.
    1888 : il se marie avec Clara Bryant.
    1891 : il devient ingénieur en chef chez Thomas Edison,

    Engagé dans la compagnie d’électricité de Thomas Edison, Henry Ford va devenir l’ami de l’inventeur.

    1893 : naissance de Edsel.
    1896 : construction de sa première automobile.
    1899 : il fonde la Detroit Automobile Company.
    1901 : création de la Henry Ford Company.
    1903 : la Ford Motor Company voit le jour. Fabrication du Model A.
    1908 : la Ford T naît le 1 er octobre.
    1914 : Ford est premier constructeur du monde.
    1915 : la millionième Ford sort de l’usine.
    1919 : Edsel devient président de l’entreprise.
    1927 : 31 mai, la dernière Ford T sort de la chaîne (16 000 000 Ford T ont été produites en 19 ans).

    2 décembre, lancement du Model A.

    1939 : lancement en Angleterre de l’Angila. L’Allemagne lance la Taunus.
    1942 : production de Jeep et de bombardiers Liberator.
    1943 : mart de Edsel. Henry reprend la présidence de Ford.
    1945 : Henry Ford II (fils de Edsel) lui succède.
    1947 : le 7 avril, Henry Ford décède à Dearborn.

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