MERCEDES Racing Car Transporter :
Genèse
En 1952, la Mercedes 300 SL brille par ses succès en compétition. Sur les cinq courses où le véhicule est engagé, elle en remporte quatre, dont une première place aux 24 Heures du Mans et une seconde place aux Milles Miglia. Après ces victoires, Mercedes-Benz décide son retour dans les compétitions de Grand Prix dans les deux ans à venir (équivalant aujourd'hui à la Formule 1). Parallèlement à la construction de ces nouvelles voitures, il était essentiel d'équiper le team d'un véhicule atelier pour le service et les réparations au bord de la piste, mais aussi d'un véhicule capable de transporter ces superbes voitures de courses.
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Alfred Neubauer, le très charismatique patron du service course de Mercedes-Benz ne pouvait pas imaginer autre chose qu'un véhicule rapide. Déjà, en 1924 il avait dessiné un transporteur équipé d'un 8 cylindres en ligne pour Daimler-Motoren-Gesellschaft. L'idée d'un transporteur capable de véhiculer les flèches d'argent ou la nouvelle SLR fut présentée à Hägel qui avait en charge le département prototype de Mercedes. Neubauer lui donna l'instruction suivante : " Faites quelque chose de bien ! "
La demande précisait clairement : " doit être rapide, très rapide même chargée d'une voiture de Grand Prix ou d'une SLR "!
L'ingénieur Hennige suggéra d'associer le châssis en X de la 300 S, aux performances du moteur de la 300 SL et aux composants de carrosserie et d'intérieur du modèle 180.
Rudolf Uhlenhaut, directeur du développement, donna le feu vert pour la construction et l'équipe se mit très vite au travail.
Et courant 1954, allait naître un véhicule des plus étonnants qu'il soit, construit à un seul exemplaire.
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Un design futuriste
Les designers du transporteur réussirent à réaliser l'impossible : créer un véhicule unique et parfait à la fois dans son dessin et sa technique. Le châssis de la 300 S fut rallongé à l'avant et à l'arrière pour soutenir une plateforme capable de recevoir une voiture. Le moteur à injection directe de la 300 SL, un 6 cylindres en ligne de 3 litres, fut installé juste au dessus de l'essieu avant, sa puissance fut ramenée de 215 bhp à 195 bhp. Cette motorisation était associée à une boite de vitesse à 4 rapports et un embrayage mono disque à sec.
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Avec 3050 mm l'empattement semblait extraordinairement long. Les freins hydrauliques à tambour aux 4 roues et un frein pneumatique Bosh de complément permettaient de décélérer le véhicule quand celui-ci était chargé. L'engin pouvait recevoir jusqu'à 3 tonnes de charge utile ! Et par mesure de sécurité un troisième frein, à disque cette fois-ci, fut installé entre les deux arbres de transmission et le différentiel.
Avec un tel moteur, le transporteur disposait d'un couple de 25,8 mkg à 4 700 tr/mn et était capable d'atteindre assez facilement 160 / 170 km/h, suivant le poids de l'auto embarquée. A l'avant les roues étaient montées sur une double triangulation avec ressorts et amortisseurs Fichtel & Sachs. Le pont arrière, équipé de pignons hypoïdes était suspendu par des ressorts et amortisseurs de la même marque.
Du pareil pas au même !
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Les spécialistes de la marque ne manqueront pas de remarquer que la cabine - et en particulier la partie avant, allant du pare-brise au bord arrière de la porte, - a un sérieux air de famille avec le modèle 180. Néanmoins, chaque pièce a été redessinée de façon plus généreuse. L'avant forme un angle escarpé que l'on retrouve sur les SL. Et l'arrière n'est pas sans rappeler la poupe des 300 SLR.
Au regard de sa forme générale - les détails de carrosserie, le moteur - il ne saurait y avoir de doutes; le transporteur est indiscutablement un Mercedes. La glace arrière de la cabine est en deux parties avec un montant central qui s'élargit vers le bas. (une fantaisie des designers ?) La partie centrale s'amincit, impression renforcée par les extensions d'ailes qui enrobent les roues. On pourrait croire à première vue que l'engin est articulé !
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Deux roues de secours sont disposées au milieu du véhicule -une de chaque côté- elles sont inclinées pour en faciliter l'extraction. C'est ici également, que sont dissimulés les deux rails permettant de faire monter les voitures sur le plateau.
Celles-ci étaient sanglées par des câbles d'acier reliant les moyeux des jantes au plateau. Le nez d'une flèche d'argent ou d'une SLR s'ajuste parfaitement derrière la cabine du transporteur, rendant la composition et les couleurs des deux véhicules particulièrement homogènes. Le dessin général intègre avec habileté le plateau et la voiture au dessus. Malgré le porte à faux avant important, il se dégage du véhicule une élégance indéniable et une impression de puissance.
"Pour nous le transporteur était une bénédiction " rapporte un ancien du département course, " quand nous avions un peu de temps avant les courses, nous y travaillions pour peaufiner ses réglages, comme une vraie voiture de course mais la pression en moins ! " Les performances du transporteur permettaient aux équipes de Mercedes de gagner un temps précieux entre deux courses.
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La Star du paddock
L'engin faisait sensation, que ce soit lors de ses déplacements sur les routes d'Europe ou au bord des circuits. Dans les paddocks il attirait les foules autant que les voitures de courses ! La question était constamment posée : " à quelle vitesse peut-il rouler ? " jusqu'au jour où une personne de l'équipe eut l'idée de peindre sur la carrosserie : Vitesse maxi 105 mph (170 km/h). Si la question n'était plus posée la curiosité demeurait.
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Le transporteur Mercedes fut utilisé par le team de la mi 54 à la fin 55, date à laquelle Mercedes se retira de la compétition suite au dramatique accident survenu aux 24 Heures du Mans. Ce fut la fin de sa courte carrière. Il traversa ensuite l'Atlantique pour quelques exhibitions aux Etats-Unis avant de revenir en Allemagne et être détruit en 1967 sur ordre du directeur du développement Mr Uhlenhauts.
Le phœnix renaît de ses cendres
Pendant des années, le musée Mercedes-Benz reçut de très nombreuses questions sur le transporteur. Et un peu plus tard, par le plus grand des hasards, quelques documents furent trouvés dans les archives de la société. Mais pas de plans précis, le transporteur avait été dessiné à main levée !
Au début des années 90, la décision de le reconstruire à l'identique a été prise par le musée. Pour cela il a fallut réunir une somme importante de documents, de croquis, de photos et même de témoignages d'anciens ouvriers ou membres du département course. Ce travail " KOLOSSAL " fut confié à la société MIKA installée à Mölln et spécialisée dans la restauration automobile de haut niveau. Au bout de 7 ans et quelques 6 000 heures de travail le phœnix put renaître de ses cendres.
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Il est en tous points conforme à l'original. Une seule concession a été accordée : des freins à disques (provenant d'une SL de 1989) ont été installés aux quatre roues. Ce qui a permis de s'en dispenser d'en installer entre le différentiel et les deux arbres de transmission comme à l'origine. L'émotion fut réelle quand l'engin, une fois terminé, fut présenté à ceux qui l'eurent connu.
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